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Maternités. Un autre regard Exposition temporaire

Mater divina

L'archange Gabriel annonce à Marie la conception divine de Jésus. Elle, la Soleiada de Joan Maragall, enceinte de lumière, se soumet au dessein divin et devient mère. Une mère divine et humaine à la fois. Une mère qui reçoit son enfant, l'aime, l'allaite, le voit grandir, le voit souffrir et enfin le voit mourir.

La doctrine chrétienne place la maternité au-dessus de la nature. Elle accorde à Marie, vierge, le rôle d'intermédiaire, et la présente comme un symbole de l'excellence féminine. Les images de la Vierge Marie, qui ont proliféré en Catalogne surtout depuis le XIIIe siècle, capturent l'idéal féminin et mettent en scène la dimension spirituelle de la maternité ; en même temps, cependant, elles véhiculent et christianisent l'idée d'une divinité ancestrale première, maternelle, créatrice.

« Que m'est-il arrivé ? » Au cours de l'histoire, aucun personnage n'a dû se poser cette question avec plus d'étonnement que Marie. La grâce est effrayante, déconcertante, merveilleuse. Semblable à un étranger qui se présente sur votre seuil : on peut tout en attendre. Pas seulement pour ce qui fait irruption de l'extérieur : il y a aussi tout ce que l'on projette sur lui, tous les soucis et toutes les joies dont on le charge.

L'Inconnu, Marie le regarde d'un bon ½il, elle l'accepte, le magnifie. Elle chante un cantique et proclame que l'Inconnu fait tomber les puissants et exalte les humbles, qu'il comble de biens les affamés et appauvrit les riches. Ce que Marie accepte, c'est que tout peut basculer. Non, peut-être que tout a déjà été bouleversé et nous ne le savions pas encore. Car le spirituel absolu a besoin du charnel absolu, il a besoin de la lenteur effrayante et encombrante de la gestation, aussi le charnel absolu est-il la plénitude du spirituel absolu.

« Marie gardait précieusement toutes ces choses et les méditait dans son c½ur », dit l'Évangile selon Luc. Toute cette étrangeté, toute cette surprise, mélange de chance et d'angoisse, d'incrédulité, de gratitude, de bonne humeur, peut-elle être concentrée en un seul regard ?

Regardez cette vierge en bois : peut-être que tout est là.

Raül Garrigasait Colomés

La Vierge à l'Enfant
Auteur inconnu
XIVe siècle
Bois polychromé et doré
Dépôt du Museu d'Art de Girona